Masques

Sacs en kraft, scotch de peintre, marqueurs : la trivialité des matériaux renforce leur pouvoir de transformation.

Les masques que je crée — artisanaux et conceptuels dans l’esprit de l’Arte Povera — sont fabriqués à partir de matériaux courants, souvent récupérés : sacs de primeurs, emballages alimentaires, collants… Leur trivialité renforce leur pouvoir de transformation. Comme une citrouille devenue carrosse, ces objets modestes changent de statut sans jamais cesser d’être eux-mêmes. Le sac reste sac, mais ce que j’y dessine — ma fiction, ma perception — se superpose au quotidien pour en troubler les contours. Ces masques dessinés sont des miroirs intérieurs. En dissimulant un visage, ils en révèlent un autre : celui façonné par l’instant, l’environnement, les émotions, le regard de l’autre — réel ou supposé et explorent la dualité entre le visible et l’invisible, l’intime et le social.

Masquer pour révéler.

Ce geste est une invitation à l’empathie. Chaque portrait masqué cache le visage du porteur ou de la porteuse, soulignant sa posture corporelle et laissant apparaître ses yeux — et peut-être son âme. À rebours des masques mortuaires qui figent les traits pour les changer en symboles, ces masques de papier, visages fragiles, célèbrent la complexité mouvante de l’instant.

Ce glissement, cette superposition du quotidien et de l’imaginaire, constitue l’essence de mon travail : masquer pour dévoiler. Il est également un pont vers d’autres disciplines (photographie, vidéo, performance, musique) et de futures collaborations.